Voici quelques extraits, avec l'accord de l'auteur, de l'hommage rendu
par Alexandre Moatti à Ivor Grattan-Guinness(1941-2014), historien
" La notion d’ingénieur-savant qu’il propose dans son
article(http://journals.cambridge.org/action/displayAbstract?fromPage=online&aid=1454452)
Science in Context 1993 (“The ingénieur savant, 1800–1830 A Neglected Figure in
the History of French Mathematics and Science”)
m’est apparue comme une grille de lecture remarquable des parcours et
des œuvres (et leurs mutuelles “convolutions”) de cette époque. Pour décrire
brièvement : à la charnière entre théorie et pratique, ainsi qu’entre
mathématique et physique, ils sont [savants >>> ingénieurs], appliquant
leurs connaissances scientifiques aux techniques et métiers de la révolution
industrielle – et ils sont aussi dans l’autre sens [ingénieurs >>>
savants], créant de nouvelles branches de la science fondamentale en les
nourrissant de leurs résultats “ de terrain” (mécanique appliquée, théorie des
machines, hydraulique, résistance des matériaux, aussi ce qui s’appellera plus
tard thermodynamique,...).
Il détaillait bien cette catégorie d’ingénieurs-savants, très
spécifiques à cette époque et à l’Ecole polytechnique de Monge, les comparant
aux plus classiques et pérennes “savants académiques”, classant les divers
savants dans chaque catégorie – certains pouvant varier dans leur carrière. Les
ingénieurs-savants, ce sont Coriolis, Navier, Saint-Venant, le second Poncelet
(celui des roues et des turbines), Clapeyron, le premier Lamé (celui des
voussures et de la résistance des matériaux, en Russie), Sadi Carnot,...; les
savants plus classiquement académiques, polytechniciens eux aussi, ce sont Biot,
Arago, Poisson, Poinsot, le premier Poncelet (celui de la géométrie),
Cauchy,...
Son analyse n’était pas exempte d’humour (britannique ?), quand il
expliquait que cette figure d’ingénieur-savant ait pu être “négligée”, dans
l’historiographie, à cause d'une forme d’aversion des historiens, et de nos sociétés
en général, envers les mathématiques, je cite (Grattan-Guinness 1993, concl.):
"As far as the history of science is concerned, the main reason is mathsphobia,
which affects its historians as it does society in general.” "
Alexandre Moatti
Ingénieur en chef des Mines
Concepteur et directeur de BibNum
www.bibnum.education.fr(http://www.bibnum.education.fr)
Chercheur associé à l’université Paris-VII
> Président d’honneur de la SABIX http://sabix.revues.org
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